Luis Sepúlveda

17 avril 2020

Le vieux qui lisait des romans d’amour a retrouvé son créateur et ils auront sûrement d’autres histoires à se raconter là où ils se trouvent.

Luis Sepúlveda, que le Covid 19 a emporté hier, a été l’un des premiers cas de ce virus diagnostiqué en Espagne, virus qu’il a contracté, semble-t-il, au Portugal. C’est là un pied de nez du destin pour ce voyageur impénitent qui, après de nombreuses déambulations en Amérique latine auxquelles l’avait contraint le régime de Pinochet, s’était installé en Espagne à Gijon, dans le pays d’une partie de ses ancêtres.

Luis que j’avais connu il y a plus de 30 ans à Quito, près du lieu où son vieil ami racontait des romans d’amour dans l’Amazonie équatorienne, était un habitué de notre festival auquel il nous avait fait le plaisir de venir à plusieurs reprises, la dernière fois en 2015, et il faisait toujours salle comble. C’était un amoureux de la vie, des contacts, de la France également car il n’a jamais oublié que c’est son éditrice historique, Anne-Marie Métailié, qui l’avait propulsé sur la scène de la gloire littéraire en publiant Un vieux qui lisait des romans d’amour, livre qui connut un succès foudroyant et fut traduit ensuite dans plus de 60 langues. Et cet amour de la vie a dû être renforcé par les épreuves qu’il a traversées avec une grande dignité, notamment celles que lui a fait subir le régime de Pinochet en le condamnant à 28 ans de prison, peine à laquelle il a en grande partie et fort heureusement échappé en étant libéré en 1977.

Il faut lire L’ombre de ce que nous avons été ou dernières nouvelles du sud, ce dernier écrit avec son grand ami, presque son frère, Daniel Mordzinski, pour comprendre Sepúlveda et la relation qu’il avait avec son pays dont il a gardé une profonde nostalgie. Lui qui se disait, je cite, viscéralement rouge, aimait raconter la vie des perdants car il considérait que la littérature doit avant tout s’intéresser à ceux qui sont oubliés. Toute sa vie a été guidée par cet engagement mais à Biarritz nous n’oublierons pas Luis, son sourire, son humanité, sa gouaille et ses grandes qualités humaines.

Serge Fohr

Président de Biarritz Festivals

 

Crédit photo: Photomobile